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  • Protéger la mère et le nourrisson

    La Sauvegarde des nourrissons

    Le bâtiment de la Sauvegarde des Nourrissons, carte postale, sans date.
    Médiathèque municipale de Tourcoing, n°1197.

    La "Sauvegarde des Nourrissons" est créée le 21 mars 1904. Gustave Dron choisit de lui donner le statut d’une association (possible depuis la loi de 1901) car il offre des facilités de gestion et d’administration. Cette procédure permet aussi un travail transversal entre les personnes désireuses de s’investir, les gestionnaires administratifs des œuvres d’assistance proposant les moyens d’action et la municipalité qui apporte les fonds nécessaires. C’est à cette formule que Gustave Dron aura presque systématiquement recours pour chacune de ses œuvres.

    Les financements proviennent principalement d’une subvention versée à la ville de Tourcoing par l’industriel américain Pierre Wibaux. En effet ce dernier, suite à la campagne de presse du journal le Matin à propos de la mortalité infantile dans la région du Nord prend contact avec Gustave Dron et propose de donner 25 000 francs à la municipalité afin de construire une ferme modèle, où un lait de bonne qualité pourra être produit.

    Pierre Wibaux, né à Roubaix au sein d’une famille d’industriels du textile, il quitte la fabrique familiale en 1883 pour les États-Unis, où il s’installe comme éleveur. L'année suivante, en 1884, il revient en Europe, se marie avec Mile Nelly Cooper et se procure des capitaux afin de développer son élevage. À partir de 1890, il étend son troupeau à plus de 50 000 têtes de bétail dans les vastes prairies du Montana et du Dakota. En plus de son activité d'éleveur, il occupe également la fonction de Président de la Banque Nationale de Miles-City (Montana). Il est aussi président d'une société d’exploitation d'or située dans les montagnes noires du Sud Dakota. En 1903, il propose aux villes de la région une somme de 25 000 francs pour : "établir des fermes modèles dont le lait pourrait être distribué dans les "meilleures conditions aux familles nécessiteuses". Il meurt le 21 Mars 1913, à Chicago, des suites d'une intervention chirurgicale.

    Par ces "consultations" s'établit un contrôle systématique de la croissance et de la santé des jeunes enfants au moins jusqu'au sevrage. En même temps la mère reçoit, suivant ses besoins, du lait non altéré, des secours, mais surtout des indications d'hygiène pratique pour elle et son enfant. Les premières consultations ont lieu le 20 avril 1904 dans l’aile gauche de l’hôpital Rue Nationale. En 1905, on peut constater que, sur 1716 enfants nés à Tourcoing, 736 ont fréquenté la Sauvegarde.

    La ferme de la Bourgogne

    Cour intérieure de la ferme de la Bourgogne, carte postale, sans date.
    Archives municipales de Tourcoing, série Fi supplément.

    En 1896 Gustave Dron écrit au préfet à propos du lait "falsifié" à Tourcoing. En effet, plusieurs opérations sont effectuées à cette époque sur le lait par les producteurs ou les commerçants, comme par exemple, celle du mouillage du lait (il est coupé d’eau) ou encore l’écrémage (la matière grasse est retirée). On constate aussi l’adjonction de substances plus ou moins dangereuses.

    Le 24 février 1901, Gustave Dron décide de convoquer à l’Hôtel de ville les cultivateurs et les marchands de lait. Souhaitant donner un aspect solennel à cette réunion, il est entouré de ses adjoints et des membres de l’administration des Hospices et du Bureau de Bienfaisance. Il explique tout d’abord aux laitiers qu’ils ont été convoqués car la mauvaise qualité nutritive de leurs produits est grandement préjudiciables aux nourrissons, malades et vieillards.

    « […] Est ce du lait qui se vend à Tourcoing ?
    Non ce qui se débite comme lait n’a plus, pour ainsi dire, de cette denrée que le nom. Tous les principes qui en constituent la base élémentaire lui ont été soustraits en grande partie.
    Le lait ainsi privé de ses qualités nutritives n’est plus qu’un déchet de lait véritable, déchet auquel des industriels peu scrupuleux ne craignent pas encore d’ajouter de l’eau, histoire de rétablir la densité. On n’a plus sous les yeux qu’un liquide blanc bleuâtre n’ayant conservé du lait qu’une vague apparence. La matière grasse, la crème a été enlevée.
    Soumis à l’analyse ce produit  révèle une pauvreté déconcertante, il ne contient plus rien, ni en matière grasse, ni en extrait sec. Bien plus, parfois l’analyse décèle à côté de l’eau, l’addition de substances étrangères plus ou moins dangereuses ajoutées pour masquer la fraude. Le lait a disparu. Un produit abominablement  frelaté, adultéré, lui a emprunté, usurpé son nom, et c’est ce produit qui est livré à la consommation aux lieu et place du lait.
    Et maintenant entrevoit-on les conséquences d’une telle situation ?
    La première, la plus grave d’entre toutes, est le chiffre de la mortalité infantile. Les petites croix de bois s’alignent dans les cimetières, marquant les places où sont couchés de pauvres petits être venus au monde bien constitués, avec les meilleures apparences de vitalité. Ce sont pour la plupart des enfants à qui la mère n’a pu donner l’alimentation naturelle pour une cause quelconque et à laquelle il a fallu substituer l’alimentation artificielle. Les pauvres petits ont ingéré le produit adultéré que nous venons de dépeindre et qui, au bout de peu de temps, les a conduits au tombeau. Comment pourrait-il en être autrement malgré les soins maternels les plus intelligents.
    Voyez cette mère tenant sur les bras un bébé de quelques semaines ou de quelques mois. Elle se lamente, elle se désole, son enfant dépérit tous les jours. Il prend de la nourriture cependant il en est avide, il se jette affamé sur son biberon ou son sabot, en absorbe le contenu et recommence ses cris. Il ne pousse pas cet enfant ! Son visage est décharné et prend cette expression navrante, il a la figure du vieillard. Enfin lorsque les ravages de l’estomac et du tube digestif sont complets, une diarrhée verte vient terminer cette existence éphémère. Il reste des parents en larmes, une mère le cœur brisé, pleurant un chérubin tué par le produit qui devait le faire vivre.
    Il est temps de mettre un terme à des pratiques traditionnelles que l’on a tolérées par inertie, et qui ont déjà fait tant de petites victimes innocentes !
    C’est une question sérieusement grave que la préservation de la vie des enfants du premier âge. On déplore que le chiffre des naissances ne soit pas plus élevé dans notre pays.
    A côté des enfants du premier âge, nous avons les malades auxquels les médecins prescrivent le lait comme un remède et un reconstituant, parfois comme un régime complet.
    Nous dirons tout d’abord qu’on pourrait simplement se borner à appliquer aux industriels qui vivent de la vente du lait les simples dispositions de la loi générale sur la falsification des denrées alimentaires, sévèrement punie par le code pénal. Ce serait la mesure radicale.
    Le lait doit être du lait, c’est-à-dire renfermer en entier tous les éléments constitutifs. Un lait écrémé en tout ou en partie n’est plus un lait complet ; donc celui qui le livre à la consommation tombe sous le coup de la loi et la loi avec raison n’est pas tendre aux falsificateurs. Vendre du lait qui n’est pas véritablement du lait entier dans ses principes c’est commettre le délit de tromperie sur la qualité de la marchandise vendue. Par suite d’une tolérance qui devait dégénérer en scandaleux abus, tolérance qui remonte à une époque déjà éloignée, on s’est accoutumé à laisser vendre le lait écrémé pour du lait. C’est-à-dire que si du jour au lendemain en présence des plaintes, des récriminations unanimes, on voulait se montrer rigoureux ou supprimer toute tolérance, on n’aurait qu’à appliquer la loi. Il n’est pas un fermier ni un marchand de lait qui ne serait en permanence sous le coup des poursuites qui pourraient lui être intentées.
    L’administration municipale mise formellement en demeure de prendre une mesure pour remédier à la situation dénoncée a longuement étudié la question…elle a songé à une mesure intermédiaire dont les résultats seraient tout à la fois de permettre à la population d’avoir une garantie de la valeur du produit qu’elle achète, tout en ne déchaînant pas brutalement contre la corporation des laitiers toutes les rigueurs de la loi… La vente de ces laits ne serait autorisée qu’autant que les récipients indiqueraient en lettres apparentes la nature du produit […] ».

    Afin d’illustrer son propos, Gustave Dron prend alors cinq des échantillons de lait achetés le matin même par la police. À titre de témoin, il y ajoute un sixième échantillon provenant d’une vache bretonne. Il procède alors, à l’aide d’un acydo-butyromètre, à une mesure de la teneur en matière grasse du liquide. Après cinq minutes, il montre les résultats à l’assemblée. Le lait breton contient 52 grammes de beurre par litre, celui des élevages de Tourcoing cinq grammes par litre. Pour être assez nourrissant pour un jeune enfant, il ne faut pas que la teneur en matière grasse soit inférieure à 30g/litre.

    Après sa démonstration, il leur demande de corriger cet état de fait. Il admet qu’il en découlera sans doute une hausse des prix et s’engage à la faire accepter à la population. Il en appel au civisme et leur laisse huit jours de réflexion. La semaine écoulée, une délégation des producteurs signifie au maire qu’il n’est pas question de modifier leur façon de faire et que l’administration municipale n’a pas à s’immiscer dans le domaine commercial. Gustave Dron sait que la poursuite systématique des contrevenants n’est pas une solution pour lutter contre la spéculation. Il n’est pas possible de systématiser les contrôles de police. En tant que partisan de la régie directe, produire en interne est pour lui la solution. L’importante consommation des œuvres sociales (en moyenne 450 litres/jour), justifie largement l’investissement.

    Gustave Dron a déjà songé, lors d’une précédente crise avec le fournisseur de lait des Hospices à doter l’institution d’une exploitation agricole. Il s’inspire en cela des asiles de Bailleul et d’Armentières dont il est président de la commission de surveillance. Mais de nombreux problèmes techniques et financiers l’avaient fait renoncer à ce projet à l’époque.

    En février 1902, les Hospices obtiennent la promesse de vente de la ferme de la Bourgogne, dite ferme Haquette, et d’une autre ferme y attenante (elle a été acheté en 1879 par le précédent propriétaire).Pour Gustave Dron, cet achat présente plusieurs avantages, en premier lieu les deux exploitations couvrent 26 hectares d’un bloc, ce qui est rare à Tourcoing ; de plus, elles sont d’un accès facile par la route départementale et par le tramway. Le financement de cette acquisition est assuré par la liquidation de rentes appartenant aux Hospices.

    Le 31 mai 1902, le conseil municipal donne son accord pour l’acquisition de la propriété. Les fermes sont encore occupées par des agriculteurs qui possèdent un bail d’exploitation. Il faut donc négocier l’abandon des droits d’occupation. Les Hospices prennent possession du domaine le 29 octobre 1902. Dès lors, la ferme de la Bourgogne n’est plus exploitée qu’au profit exclusif des établissements hospitaliers de la ville.

    Le conseil municipal vote, lors de la séance du 2 juillet 1902, un crédit de 200 000 francs afin d’y faire réaliser des travaux de modernisation. Il convient d’élaborer les plans des nouvelles installations avec soins. Le lait produit par cette ferme est destinée aux malades et aux nouveaux-nés. L’hygiène doit être une priorité. Il n’existe pas, à cette époque, de normes de construction pour les laiteries. Gustave Dron prend en charge le dossier. Mais la réalisation des plans est particulièrement délicate. Gustave Dron, en janvier 1903, doit aller chercher conseils auprès du vétérinaire départemental, Monserrat, qui l’aide à définir les règles de construction et d’aménagement d’une étable, d’une laiterie et d’une salle de pasteurisation valable. Les anciens locaux de la ferme serviront aux soins vétérinaires (vêlage, maladie) mais également à l’élevage de quelques porcs. Les travaux commencent le 22 juin 1903 et sont financés en grande partie  par la subvention Wibaux.

    Après quelques essais de pasteurisation, l’inauguration a lieu le dimanche 27 mars 1904 en même temps que celle de l’école des Beaux Arts afin de profiter de la venue de représentants du gouvernement. Le personnel de la ferme est très hostile aux nouvelles méthodes employées dans la laiterie. Il ne comprend pas que l’on doive donner à manger au bétail autre chose que des résidus de distillerie qui rendent le lait impropre à la consommation des nourrissons. La seule nourriture envisageable à la Bourgogne est le tourteau de lin ou les résidus de brasserie, or cela entraîne un surcoût important. Il est difficile aux fermiers d’envisager de produire sans profits. Il leur est également demandé de tenir une comptabilité précise de toutes les entrées et sorties de fournitures, chose qui n’est pas habituelle chez les agriculteurs de l’époque. C’est dans sa ville natale à Marcoing que Gustave Dron trouve le directeur capable non seulement de comprendre et d’assurer le fonctionnement de la laiterie, mais aussi d’en compléter les installations en créant un laboratoire d’analyse et un service de distribution à domicile.

    La superficie de la ferme s’agrandit grâce à l’achat de nouveau terrains. À la fin de l’année 1906, elle atteint sa superficie définitive. Quarante vaches produisent sept cent litres de lait par jour. La traite du matin est réservée aux nourrissons car le lait est plus riche, celle du soir aux malades et vieillards. Après pasteurisation, le lait est distribué dans 13 dépôts : écoles maternelles, crèches, hôpital, hospices et le Bureau de bienfaisance.

    Le congé maternité

    En février 1886, Albert de Mun dépose à la Chambre des députés une proposition de loi visant à améliorer les conditions de travail des ouvriers. Il est stipulé dans l’article 9 que « […] les ouvrières d'usine en couches ne pourront être employées à aucune tâche industrielle pendant quatre semaines après l'accouchement […] ». Mais elle n’est pas réellement appliquée et l’article 9 est rapidement abandonné. En effet, cette première avancée vers le congé de maternité suscite de fortes défiances. Pour certains réglementer la maternité revient à laisser l'État s’introduire dans la sphère économique. Armand Després, député et chirurgien des hôpitaux de Paris, assure : « […] Ces choses-là ne se mettent pas dans la loi, le bon sens et l'esprit français s'y refusent, ce serait un objet de risée […] ».

    Au sein de la commission d’étude de la natalité, Gustave Dron a décidé de lutter par tous les moyens contre la mortalité infantile. Pour lui, ce combat passe également par la protection des femmes, une extension de leurs droits et un encouragement à l’éducation. Militant inlassable, il en profite pour attirer l’attention de ses collègues sur la question. Il trouve auprès de Paul Strauss, Pierre Budin et d’autres parlementaires médecins une aide et un soutien. Dès 1891, Gustave Dron propose de légiférer sur le repos des femmes accouchées. Pour lui, cette disposition permet de lutter contre la mortalité infantile car non seulement on protège la santé de la femme et on lui permet d’avoir d’autres enfants, mais surtout on lui donne la possibilité de s’occuper de son bébé. Il produit à la Chambre un  rapport sur la proposition d’interdire le travail industriel aux accouchées pendant un certain délai et présente le projet de loi correspondant.

    Parallèlement, Émile Brousse profite d’une nouvelle discussion sur l’ article 9 pour relancer l'idée d'une indemnisation du congé de maternité par le biais d'une caisse spéciale et présente lui aussi une intention de loi. C’est Gustave Dron qui est chargé de rapporter les deux projets en première discussion devant la Chambre. Ils sont accueillis avec réserve notamment par le ministre des Finances, Maurice Rouvier, et bon nombre de ses collègues parlementaires qui lui reprochent la charge financière qui pèserait sur le budget de l’État. Même Albert de Mun refuse de le suivre sur la question de l’indemnisation. Paul Doumer souligne qu’il n’est pourtant pas logique d’imposer un repos aux ouvrières et de ne pas assurer le manque à gagner. Pour d’autres, puisque chaque femme réagit différemment à la maternité, il ne faut pas légiférer. La loi adoptée lors d’une première délibération n’est pas présentée en deuxième lecture.

    C’est Paul Strauss, en 1899, qui reprend à son compte le projet de Gustave Dron en s’appuyant sur les travaux de la commission extra-parlementaire. Il souhaite « […] que toute femme enceinte reçoive l’assistance nécessaire pour se trouver dans les conditions d’accouchement indispensables pour elle et son enfant dans les trois derniers mois de la grossesse […] ». Une fois, cette loi adoptée, Paul Strauss s’attache à assurer à la mère l’indemnisation de ce congé ainsi que la garantie de recouvrer son emploi. Le fait de dissocier les lois lui permet de mieux faire accepter le projet à la chambre. Il met pourtant treize ans à le faire admettre.

    Les crèches

    Crèche des Poutrains, Tourcoing, photographie, vers 1900.
    Archives municipales de Tourcoing, M 4 C100-48.

    Trop souvent forcées de subvenir par leur travail aux besoins d’une famille nombreuse, les mères se voient dans l’obligation de confier leur enfant à une personne plus ou moins vigilante. Elle peuvent également l’emmener à l’usine et le garder dans l’atmosphère insalubre de l’atelier. Pour Gustave Dron, il convient de les aider en ouvrant des structures adaptées qui proposent une alimentation et des soins appropriés à l’âge des bébés.

    En 1892, il demande à la ville de Tourcoing la création d’une crèche municipale. Il s’inspire en cela de la crèche de Rouen qu’il considère comme idéale. La ville choisit pour construire le bâtiment un terrain faisant parti du jardin public, rue des Poutrains. En 1895, une seconde pouponnière est installée rue de Guisnes.

    Les deux structures sont ouvertes six jours sur sept et, pour un prix modique accueillent les petits âgés de deux semaines à trois ans. Les enfants arrivent souvent le matin dans un état de grande saleté avec des vêtements qui n’ont pas été lavés depuis plusieurs jours. C’est pourquoi on les habille avec l’uniforme de la crèche. Ils y restent de dix à douze heures d’affilées car les horaires de travail des mamans sont importants. Les parents ne sont pas admis à l’intérieur. Les bébés y sont nourris avec du  lait, provenant de la ferme de la Bourgogne, et les parents repartent également avec des biberons pour la nuit. Outre la directrice, le personnel est composé de jeunes femmes appelées les "Berceuses"qui s’occupent des enfants. En 1909, 116 petits profitent de ces installations qui fonctionnent jusqu’en 1914.

    Après la guerre, Gustave Dron ne se représente pas aux élections municipales. Son successeur, le docteur Leduc, choisit de ne pas rouvrir les crèches et de mettre les bâtiments à la disposition des syndicats.

    Trop souvent forcées de subvenir par leur travail aux besoins d’une famille nombreuse, les mères se voient dans l’obligation de confier leur enfant à une personne plus ou moins vigilante. Elle peuvent également l’emmener à l’usine et le garder dans l’atmosphère insalubre de l’atelier. Pour Gustave Dron, il convient de les aider en ouvrant des structures adaptées qui proposent une alimentation et des soins appropriés à l’âge des bébés.

    En 1892, il demande à la ville de Tourcoing la création d’une crèche municipale. Il s’inspire en cela de la crèche de Rouen qu’il considère comme idéale. La ville choisit pour construire le bâtiment un terrain faisant parti du jardin public, rue des Poutrains. En 1895, une seconde pouponnière est installée rue de Guisnes.

    Les deux structures sont ouvertes six jours sur sept et, pour un prix modique accueillent les petits âgés de deux semaines à trois ans. Les enfants arrivent souvent le matin dans un état de grande saleté avec des vêtements qui n’ont pas été lavés depuis plusieurs jours. C’est pourquoi on les habille avec l’uniforme de la crèche. Ils y restent de dix à douze heures d’affilées car les horaires de travail des mamans sont importants. Les parents ne sont pas admis à l’intérieur. Les bébés y sont nourris avec du  lait, provenant de la ferme de la Bourgogne, et les parents repartent également avec des biberons pour la nuit. Outre la directrice, le personnel est composé de jeunes femmes appelées les "Berceuses"qui s’occupent des enfants. En 1909, 116 petits profitent de ces installations qui fonctionnent jusqu’en 1914.

    Après la guerre, Gustave Dron ne se représente pas aux élections municipales. Son successeur, le docteur Leduc, choisit de ne pas rouvrir les crèches et de mettre les bâtiments à la disposition des syndicats.

    Les jardins des mères

    Un des cinq jardins des mères de Tourcoing, photographie, sans date.
    Archives municipales de Tourcoing, série Fi supplément.

    Les travaux des médecins hygiénistes ont mis en avant que le manque d’aération et la promiscuité étaient des facteurs favorisant l’apparition des maladies, notamment la tuberculose. Ils préconisent l’aménagement de jardins réservés aux très jeunes enfants dans les grandes villes afin de lutter contre la mortalité infantile qui sévit dans le milieu ouvrier à cette époque. Il faut permettre aux petits de sortir du taudis qui leur sert de logement. En 1925, Gustave Dron décide l’installation de semblables squares, appelés Jardins des mères. Sur des terrains spécialement gazonnés et aménagés, les mamans peuvent venir y aérer leurs bambins. À Tourcoing en 1930, ils sont au nombre de cinq répartis dans les différents secteurs de la ville : le jardin des Orions, du Palais de justice, du Congo, du Chêne Houpline et de la Blanche Porte.

    La gestion de ces aires de jeux est placée sous l’égide de la Sauvegarde des nourrissons. Elles sont accessibles chaque après-midi de 14 à 18h et fermés le dimanche. Des membres de l’association animent les après-midi et offrent chaque jour un goûter aux bambins. Afin de les inciter à une fréquentation assidue, des tickets de présence sont remis aux mères leur donnant la possibilité de participer à de nombreuses tombolas. Ces jardins sont ouverts d’avril à septembre. Le début et la fin de la saison sont l’objet d’une fête à laquelle Gustave Dron ne manque pas d’assister en tant que maire et président de la sauvegarde des nourrissons.

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