Passage du cortège présidentiel sur la Grand'place de Tourcoing le 6 juin 1906, photgraphie.
Archives municipales de Tourcoing, fonds Vanneufville série Fi supplément. |
En 1902, Tourcoing est désignée ville organisatrice de la 32ème fête fédérale de gymnastique de France, les 3 et 4 juin 1906. Gustave Dron, souhaite profiter de l’attention nationale qui est portée sur la ville à cette occasion pour organiser, à l’instar de Lille et d’Arras précédemment, une exposition industrielle. Émile Loubet, président de la République, politiquement proche de Gustave Dron, programme sa venue à Tourcoing afin d’honorer l’événement. Cependant à l’issue de son mandat, il ne se représente pas et, le 18 janvier 1906, Armand Fallières lui succède. Gustave Dron désireux de maintenir la visite présidentielle doit convaincre le nouvel élu d’honorer les engagements de son prédécesseur. Celui-ci accepte d’assister à la manifestation tourquennoise et d’effectuer par la même occasion sa première visite officielle en province. Il vient en compagnie des ministres de la Guerre et de l’Intérieur, les fêtes de gymnastique étant placées sous leur patronage. |
Le 2 juin 1906 : Le drapeau fédéral et des drapeaux étrangers arrivent à Tourcoing où ils sont accueillis par le rassemblement des gymnastes place de la Gare. Puis, tous défilent accompagnés de musique militaire jusqu’à l’Hôtel de ville. L’étendard fédéral entre solennellement dans la mairie avec les athlètes pour un vin d’honneur. Puis, le cortège se dirige vers la résidence du président du comité d’organisation, rue Soufflot. Le 3 juin 1906 :Eugène Étienne, ministre de la Guerre arrive dans la nouvelle gare de Tourcoing, il est reçu par la troupe qu’il passe en revue et se rend en cortège jusqu’à l’Hôtel de ville. Il passe une partie de son après-midi à assister aux démonstrations des athlètes ainsi qu’au tournoi d’escrime. Il visite ensuite le cercle des officiers. En fin de journée, il préside un banquet à l’Hôtel de ville. Les compétitions continuent jusqu’au 6 juin date de la visite présidentielle. Le 6 juin 1906 : Armand Fallières arrive par le train à 10h30, accompagné du ministre de la Guerre et de Georges Clemenceau qui a en charge l’Intérieur. Il est accueilli par Gustave Dron et le préfet du Nord, Louis Vincent. Sur la place de la gare, il procède à une remise de médailles militaires. À 11 h 30, le président de la République, les ministres et le maire de Tourcoing traversent la ville, en calèches découvertes, jusqu’à l’Hôtel de ville pour une réception destinée aux édiles municipaux, aux délégations et à la presse. La ville est décorée et pavoisée pour l’occasion. Les habitants saluent le cortège officiel. Dans la salle des délibérations du conseil municipal un repas est servi. À 14h15, l’assemblée quitte l’Hôtel de ville pour l’hôpital que le président visite longuement, principalement la maternité. Les bâtiments ont été rafraîchis pour l’occasion, les peintures refaites et les allées repavées. Gustave Dron explique de façon détaillée l’organisation de l’établissement de soins et son action en faveur des mères de famille. Il expose également ses nombreux projets à venir. Dans le jardin réservé aux enfants, les mères bénéficiant de l’action de la Sauvegarde des Nourrissons accueillent le président, leur bébé dans les bras. Elles viennent se presser autour de lui. Le maire développe les circonstances qui l’ont conduit à la création de cette institution. Armand Fallières touché par l’accueil s’attarde près des mamans. Il salue le comité des Dames Charitables avec à leur tête Madame Leloir et Maria Dron. Puis, il visite rapidement l’exposition des industries textiles. Vers 16 heures, le chef de l’État se rend à la fête de gymnastique pour assister aux exhibitions Puis à 18h15, il regagne l’Hôtel de ville pour le banquet de 300 couverts servi dans la salle des fêtes de la mairie. Georges Clemenceau annonce au terme des discours que la médaille d’or de l’Assistance publique est accordée à Gustave Dron en récompense de son action sociale à Tourcoing (elle lui sera remise le 22 juin). Le président déclare qu’il lui alloue également l’importante somme de 5 000 francs, à répartir entre les mères de la Sauvegarde des Nourrissons et les utilisatrices des crèches. Enfin, vers 20h30, l’assemblée se dirige vers la gare pour rentrer à Paris. |
Ce type de manifestation est courant et très populaire à l’époque. La première exposition internationale a lieu à Londres en 1851. D'autres grandes villes suivent : Paris (1855, 1867, 1878, 1889, 1900), Vienne (1873), Barcelone (1888), Bruxelles (1897) et Saint-Louis (1904). On distingue deux types d’expositions : les universelles très généralistes et les internationales plus spécialisées. À Tourcoing, c’est naturellement l’industrie textile qui est mise à l’honneur. Ce type de présentation est avant tout une vitrine technologique et industrielle. Ces événements attirent les artisans, les innovateurs et les producteurs du monde entier. Nous savons que Gustave Dron est un habitué de ce type de manifestation. Il est, notamment, chargé de mission par le gouvernement à l’exposition de Chicago en 1893, responsable de celle d’Arras en 1904. Il est membre du comité de patronage du congrès pour la protection des travailleurs lors de l’exposition universelle de Paris en 1900. Afin d’alléger l’organisation d’une telle démonstration, la municipalité et la Chambre de commerce de Tourcoing s’allient avec la ville de Roubaix. Gustave Dron souhaite une manifestation avec un programme soigné et précis. Il souhaite reconstituer à Tourcoing une vaste usine internationale. Les autres attractions ne sont là que pour attirer les visiteurs. C’est Lami, publiciste d’Enghien, qui est chargé de la conception de l’ensemble de l’exposition sous le contrôle de la municipalité qui met à sa disposition un terrain en bordure du canal, à la périphérie de la ville. Celui-ci est loué et s’étend sur 7 hectares de pâtures. Lami s’engage à construire les bâtiments, annexes et clôtures nécessaires, mais aussi à les démolir. Il ne doit pas toucher aux arbres de l’angle de la rue du Halot et de la rue du Quai. Il doit gérer également l’hygiène et l’installation électrique du site. Les travaux doivent être finis pour le 15 avril 1906 et le terrain doit être remis en état pour la fin du mois de décembre 1906. Lami choisit, avec le maire, les attractions et fixe même les émoluments du personnel. C’est un comité d’initiative présidé par Gustave Dron qui est chargé de superviser le travail de Lami. On y trouve des roubaisiens comme François Roussel, président de la Chambre de commerce, ainsi qu’Eugène Jourdain son homologue tourquennois, lui aussi un habitué des expositions depuis 1889. Participent également des industriels, le directeur desacadémies des Beaux-Arts, Amédée Prouvost, président du syndicat des peigneurs de Roubaix. Ces expositions sont toujours accompagnées de congrès portant sur des sujets divers ; Tourcoing n’échappe pas à la règle et une dizaine de colloques sont organisés :
Gustave Dron tient tout particulièrement à superviser le congrès d’hygiène et d’assistance qui a lieu du 19 au 23 septembre. La première journée est placée sous la direction d’Albert Calmette, directeur de l’Institut Pasteur de Lille. Celle du 21 est présidée par Paul Strauss, sénateur et président du Conseil supérieur de l’Assistance publique. Le 22, Gustave Dron présente une communication sur « L’assistance par le travail ». Les participants sont au nombre de 200. Le professeur Budin, créateur des consultations pour nourrissons, a tenu à être présent auprès de son ami maire de Tourcoing. L’abbé Lemire, Arthur Stoclet, des représentants des gouvernements belge, serbe et ottoman sont au rendez-vous. L’ensemble du congrès est consacré à l’étude des mesures immédiatement applicables dans le domaine de l’hygiène :
À l’issue des débats, une visite détaillée de toutes les institutions d’assistance de Tourcoing est proposée aux congressistes : hospices, hôpital, bureau de bienfaisance, consultation des nourrissons, crèche de la rue des Poutrains, assistance par le travail, sanatorium ainsi que la ferme de la Bourgogne. |
Le comité organisateur souhaite également présenter aux publics une exposition d’art en liaison avec l’exposition industrielle. Il choisit pour cela deux salles à l’écart du site afin d’amener le public à circuler dans la ville et donc de favoriser le commerce. Gustave Dron dans un premier temps n’y est pas favorable. Il considère cela comme une dépense trop importante. Puis, peu à peu, il trouve le projet intéressant et propose une réflexion sur la teneur et le titre de cette exposition. Des membres du comité suggèrent d’emprunter des œuvres aux églises belges. Dron répond : « […] Ce qui est entre les mains des églises il est difficile de l’en faire sortir. Ce sont des gens des moins sociables, ils ont leur petit trésor et ils le gardent […] ». Au final, deux thèmes sont retenus. Une première partie présente une rétrospective de l’art régional, l’autre est consacrée aux Beaux-Arts. Les expositions sont logées dans deux bâtiments, l’école des Beaux-Arts et un gymnase à construire place Saint-Jacques. La section des Arts rétrospectifs est placée sous l’égide de Devillars, président de la Société artistique de Tourcoing. La partie Beaux-Arts est confiée à Victor Flament, adjoint au maire de Tourcoing et conseiller général. Édouard Bisson, commissaire général de la Société des artistes français est nommé responsable de la conception. Enfin, un comité de professionnels est créé comprenant Charles Bourgeois, Jean-Baptiste Maillard et Maxime Sévin architectes, les conservateurs du Louvre , du musée des arts décoratifs de Paris ainsi que Carolus-Duran directeur de l’École de Rome. L’inauguration a lieu le 12 juillet. |